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Noémie Grynberg Penser le monde : information et analyse

De Laish à Dan : entre histoire, nature et biotechnologie

D'abord dominée par les Phéniciens, la cité biblique de Laish ou Leshem, se situe dans la vallée de Huleh, près des sources du Jourdain. Dès le 18e siècle avant J.-C., la ville est mentionnée dans des textes égyptiens relatant sa conquête par le pharaon Toutmosis III en -1469. Lors de la conquête d’Israël par les Hébreux, la tribu de Dan vainquit par surprise Laish et lui donna son nom, ville que Dieu montra à Moise avant de mourir. Aujourd’hui, le kibboutz Dan est reconnu pour ses prouesses biotechnologiques piscicoles.

Dans la Bible, Dan est citée de nombreuses fois sous des appellations différentes : dans le livre du prophète Josué, dans la Genèse lorsque Abraham est poursuivi par les quatre rois, dans le Deutéronome lors de la mort de Moise, dans le livre des Rois et des Juges.

A la période des Juges, Dan était considérée comme l’extrême pointe nord d’Israël. Au 10e siècle avant J.-C., Jéroboam I décida d’y édifier un lieu de culte, un temple avec des veaux d'or où les prêtres officièrent jusqu’au temps du premier exil en -733. Sans aller jusqu'à faire croire au peuple que ces reproductions étaient des dieux, il n'en violait pas moins le commandement interdisant les images sculptées. Les prophètes critiquèrent vivement cette initiative qui concurrençait Jérusalem. Durant le règne de son successeur Baasa, la cité fut pillée par Ben-Hadad, roi de Damas. Dan fut alors la voie ouverte de toutes les invasions du pays.

A la période hellénistique, Dan fut appelée Antioch et marquait le point le plus au nord des conquêtes d’Alexandre Yannai. Au temps du Talmud, la ville retrouva son nom biblique de Kefar Dan. Aujourd’hui, la ville antique est identifiée à celle de Tell Dan. En 1966, des fouilles y furent menées et permirent de découvrir des remparts en terre, de solides fortifications dont une monumentale porte menant à une rue pavée ainsi que des bâtiments datant de l’Age de Bronze jusqu’à la période de l’Age de Fer.
Les preuves archéologiques de la destruction de la ville à l’Age de Bronze confirment l’histoire biblique de la conquête de Dan.

En 1993, une stèle basaltique (bloc de pierre dressé portant une inscription, souvent utilisé pour marquer une frontière ou commémorer un événement important dans la vie de ses créateurs, par exemple une victoire militaire) faisant partie d’un mur daté du 9ème siècle avant J.-C. y est découverte lors de nouvelles fouilles. Elle serait contemporaine du roi Achab d’Israël ou du roi Josaphat de Juda. Le texte de la stèle mentionne « Israël » et — pour la première fois dans un document extrabiblique – « la maison de David », qui se réfère d’après la Bible non seulement à la famille (ou aux gens qui sont sous son toit) du roi David, mais aussi à ses descendants qui se sont assis sur le trône à Jérusalem et ont régné sur Juda. Il semble raisonnable de penser que la « maison de David » est une référence au royaume de Juda, et que la simple référence à David — en dehors de la Bible — écarte de nombreuses contestations de l’historicité du roi David.
D’autres fragments trouvés en 1994 suggèrent que la stèle se réfère au meurtre du roi Joram d’Israël et du roi Achazia de Juda par Jéhu.

Aujourd’hui, le Kibboutz Dan se trouve près des sources de la rivière du même nom, en Galilée. Affilié au mouvement de la Shomer Hatsair, il fut fondé en 1939 par des pionniers roumains, rejoints plus tard par de nouveaux immigrants venus de différents pays. Le Kibboutz faisait partie du projet d’implantations appelé « La forteresse Ussishkin » à la frontière syrienne. Lors des premiers mois de la guerre d’Indépendance en 1948, Dan dut repousser les attaques ennemies. Durant les vingt années qui suivirent, le Kibboutz se trouva régulièrement sous les feux de l’artillerie syrienne, surtout lors de la guerre des Six Jours.

Actuellement, la population du kibboutz Dan s’élève à approximativement 560 membres. Il comprend une usine de plastique, mais surtout se spécialise dans l’exploitation intensive piscicole, notamment dans l’élevage d’esturgeons en captivité, programme lancé en 1994. Au début, une petite quantité d’esturgeons fut importée de Russie et élevée dans les centres piscicoles du kibboutz. En 1998, la Convention du Commerce International des Espèces en Danger de la Flore et la Faune révéla que sans une action internationale immédiate, le danger d’extinction de l’esturgeon dans la Mer Caspienne était imminent. Ce fut une aubaine pour l’activité piscicole du kibboutz Dan. Ainsi, le caviar «Produit d’Israël» est obtenu grâce au procédé par lequel le poisson atteint sa maturité en sept à huit ans au lieu de douze à quatorze ans. Les entreprises «Caviar de Galilée», filiale des centres de pisciculture du kibboutz Dan, travaillent en coopération avec le Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural d’Israël. Dans un premier temps, «Caviar Hagalil» a produit ses premiers 20 kilos de caviar. Sur les marchés européens, le caviar se vend 2.000 dollars le kilo. «Notre but est d’atteindre une production de 4 tonnes de caviar par an d’ici fin de 2007» déclare le professeur Hourvitz de l’école d’agronomie de l’Université Hébraïque de Jérusalem qui travaille sur ce projet.

Les Centres d’Elevage de Poissons Dan sont également spécialisés depuis des années dans le développement de nouvelles espèces pour l’agriculture : vaccins et systèmes de vaccination à base de poisson, expériences sur l’alimentation des poissons, ainsi que l’élaboration de produits biotechniques à base de poisson. «Nous élevons plusieurs espèces de poissons de rivière dont 350 tonnes de truites arc-en-ciel par an environ et à peu près 200 tonnes de carpes», précise le professeur Hourvitz.

L’autre particularité du Kibboutz Dan réside dans sa production de films documentaires. Il comprend également le musée Bet Ussishkin sur la végétation, la vie sauvage, les antiquités et l’histoire de l’implantation de la région. Raison de plus s’il en fallait pour aller visiter cet endroit entre histoire, nature et biotechnologie.

 

Israel Magazine / Noémie Grynberg 2005

 

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