Mentionné dans la Mishna et le Talmud, le mont Sartaba, à la frontière nord-ouest de la Judée, culmine à 377 mètres d'altitude. Son sommet était autrefois occupé par la forteresse hasmonéenne d’Alexandrion (Alexandrium), construite au 1e siècle avant l’ère chrétienne par le roi Alexander Yanai en l'honneur de son épouse Shalomtzion.
L’origine du nom Sartaba est incertaine. Il s’agirait des mots hébreux « Sar Tsava » (Ministre des armées de dieu) se rapportant à Josué lors du siège du Jericho.
Le mont est l'un des plus beaux et impressionnants de toute la Samarie, à la limite de la Judée. Au sommet, le spectacle de la nature est à couper le souffle : en-dessous, les champs agricoles contrastent avec le désert environnant ; à l'est, les montagnes de Moab et de Galaad ; à l’ouest la Samarie, et au nord la Galilée.
Sur cette hauteur en forme de pyramide mystérieuse, dominant la verte vallée du Jourdain entre Beth Shean et Jéricho, se dressait naguère l'une des plus importantes forteresses antique de l'époque hasmonéenne : Alexandrion. A l’époque du Second Temple, le bastion servait probablement de tour de signalisation d’où les feux étaient allumés pour annoncer la nouvelle lune aux exilés de Babylone. Les sources juives la mentionnent comme la deuxième station à partir de laquelle ils étaient relayés depuis le Mont des Oliviers à Jérusalem. Ainsi, Sartaba symbolisait l’unité de la nation juive et le paradigme de son idéal national. En outre, la plupart des princes de la maison d'Alexandre Yanai y sont enterrés.
L’histoire mouvementée et tragique du fort
En -90, le roi Alexander Yanai, descendant du Judas Macchabée, construit le fort (d’où son nom) afin de renforcer le point de contrôle à la frontière orientale de la Judée contre les envahisseurs venus de l'est. En effet, au premier siècle avant l’ère vulgaire, Alexandrion sert les Hasmonéens dans leurs batailles contre les Romains. Elle accueille une garnison militaire et consigne les prisonniers politiques.
En -63, pour barrer la route à Pompée montant vers Jérusalem via Jéricho, le roi Aristobule II, fils d'Alexandre Yanai, s'enferme avec sa mère à Alexandrion qui marque alors la limite nord de la Judée. Assiégé, Aristobule II se rend.
En -57, Jonathan Alexandre II, fils d'Aristobule II, fait réparer la forteresse. Il s’y réfugie avec son armée (4.500 hommes) et tient tête au proconsul de Syrie, Aulus Gabinius. Se voyant pressé, le prince hasmonéen demande la paix à son adversaire. Il l'obtient en cédant la forteresse d’Alexandrion que les troupes de Gabinius rasent sur le conseil de la mère d'Alexandre, qui craignait que la citadelle ne fournisse à son fils de nouvelles occasions de révolte contre les Romains.
Plus tard, le fort est restauré par le roi Hérode pour y cacher ses trésors. Il y enterre également sa belle-mère, sa femme et ses deux fils, ces trois derniers exécutés sur ses ordres.
Durant la Grande Révolte juive du 1e siècle de l’ère chrétienne, une garnison romaine stationne à Alexandrion. Vers l’an 70, la forteresse est à nouveau rasée par Vespasien ou Titus.
Les vestiges d’Alexandrion
Les décombres de l’ancienne ville ont été découverts en 1981-1983, lors de fouilles archéologiques. La partie d’une structure, apparemment un palais hérodien décoré d’un chapiteau corinthien et ionique, a été partiellement mise à jour. Elle contient une salle munie de chaque coté de colonnes sculptées. Certaines pierres sont taillées en forme de cœur. Les murs et le plafond de l’édifice étaient ornés de fresques et le sol pavé de mosaïques. Parmi ces vestiges, les restes d’un mur appartenant probablement au bâtiment construit par Alexandre Yannai, et ceux d'énormes citernes d'eau. Sartaba compte aussi nombre d’objets anciens : de petits fragments de jarres à vin où figurent des inscriptions en hébreu, en araméen et en grec, ainsi que des pièces de monnaie hasmonéenne ont été découverts au milieu des décombres. Enfin, au pied de la colline, une partie du système hydraulique comprend les fragments d’un aqueduc, de bassins et d’un siphon.
Plusieurs pistes de difficulté variable permettent d’accéder à la citadelle aujourd’hui en ruine. Cependant, bien que le sentier très raide soit balisé, il est recommandé d’être accompagné d’un guide. Cette randonnée est particulièrement agréable au printemps - mais très chaude en été - quand les fleurs couvrent la colline : jacinthes pourpres (typique de la vallée du Jourdain), anémones rouges et sauge. Il est également possible de faire le circuit en 4x4.
Noémie Grynberg 2013