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Noémie Grynberg Penser le monde : information et analyse

Les femmes dans la hi-tech israélienne

En Israël, les femmes représentent plus de 60% de la population active mais seulement 38% des emplois en haute technologie. Une proportion trop faible selon les intéressées. La hi-tech reste donc encore un domaine majoritairement masculin. Mais depuis quatre ans, la situation semble progresser.

Le phénomène global de sous-représentativité féminine dans la hi-tech touche également Israel alors que la start-up Nation figure comme l’une des plus dynamique au monde dans ce secteur. Pourquoi ?
Premièrement, l’école. Le système n’encourage pas les filles dans les matières scientifiques. Du coup, au baccalauréat de mathématique, elles passent l’examen au niveau moyen (3 unités) au lieu du niveau avancé (4 unités) ou très avancé (5 unités). Or pour embrasser des études technologiques, le niveau minimum demandé est de 4 unités.
Deuxièmement, l’armée. Tsahal reste la première pourvoyeuse de techniciens qualifiés de la high-tech. Or peu de femmes servent dans ces unités technologiques. Même celles qui obtiennent leur diplôme dans l'unité 8200 (renseignement électromagnétique et décryptage de codes), avec les mêmes compétences que les hommes, n'atteignent pas les postes analogues et certaines n'intègrent même pas la haute technologie.
Troisièmement, le familialisme, c’est-à-dire la tendance à mettre en avant l'importance de la famille dans la société. En effet, celle-ci joue un rôle central en Israel, à la fois au niveau individuel et collectif. Kira Radinsky, informaticienne et entrepreneuse, confirme : « le domaine de la technologie n’est pas encore perçu comme un champ féminin car la vision de la femme israélienne reste assez traditionnaliste : elle demeure le pilier de la famille. »
Kira Radinsky
Quatrièmement, le monde de la hi-tech s’avère très concurrentiel. Or socio-culturellement, les femmes vont moins vers la compétition, l’offensive. Shelly Hod Moyal, co-fondatrice avec Mor Assia de iAngels, une plate-forme d'investissement qui fournit au monde entier l'accès aux startups israéliennes, admet que les femmes sont « moins assertives, montent moins au front ». De plus, les femmes s’autocensureraient elles-mêmes et s’empêcheraient, du fait de certains stéréotypes sociétaux, de progresser dans ce domaine.
Les entreprises hi-tech reçoivent donc trop peu de candidatures féminines. La plupart des recruteurs hésitent encore à engager des femmes et les investisseurs semblent frileux à financer des projets qui sortent de leurs domaines traditionnels (mode, cuisine, maternité, etc.)
Bien que ces discriminations, notamment salariales, existent, les choses changent pas à pas. Ce que constate Kira Radinsky, 31 ans, elle-même cofondatrice de SalesPredict, une société pionnière en matière d'intelligence artificielles qui collabore avec Microsoft, Google, Facebook et Yahoo. « La jeune génération se bat de plus en plus » pour faire sa place dans ce secteur de pointe. Du coté de Mor Assia et Shelly Hod Moyal, même constat. Les femmes feraient peu à peu leur entrée dans ce monde masculin. Elles remarquent depuis 4 ans « une tendance positive, une amélioration et un réveil ». Pour elles, Israel représente un laboratoire miniature pour le monde, un chef de file qui doit montrer l’exemple grâce à son écosystème d’innovation. Plus : un leader dans le changement des tendances sociales, ajoute Merav Oren, fondatrice et PDG de WMN - un espace de coworking, d’échange et de promotion des projets technologiques féminins.
Il est bon donc que plus de femmes se dirigent effectivement vers la hi-tech, prennent progressivement le devant de la scène. Ce qui ne manquera pas de profiter à Israel et à sa renommée. Selon la cofondatrice de SalesPredict, les Israéliennes s’investissant davantage dans la hi-tech peuvent effectivement renforcer la position de leadeur du pays.

iAngelsPour le binôme d’iAngels, il parait important que le changement s’opère car la diversité des expériences personnelles permet une bonne résolution des problèmes et l’ouverture de nouveau horizons pour une meilleure réussite. Pour ce faire, il faut encourager la prise de conscience, l’éducation et l’implication des femmes dans le débat, ainsi que mettre en avant les modèles de succès féminins. C'est exactement ce que WMN a l'intention de faire : créer un espace physique et virtuel de rassemblement et de travail afin de donner les outils professionnels aux femmes startupistes et ainsi d’augmenter leur pourcentage dans la hi-tech. Merav Oren sait que le vrai changement ne se fait pas en un jour, il faut du temps et des moyens. Plus les femmes s’investiront dans le Venture Capital, la direction d’entreprise et le financement de projets, plus elles réussiront et deviendront un exemple. C'est l'effet boule de neige. De quoi se dire chacune optimiste quant à l’avenir.
D’ailleurs, des programmes existent pour inciter les femmes en ce sens. Tech Women promeut les filières technologiques auprès des lycéennes israéliennes de tout le pays. ‘’Future génération Hi-Tech ", une initiative du Forum des femmes industrielles, géré conjointement avec l'Autorité des sciences et de la technologie du Ministère de l'éducation et le Commandant du Corps des femmes de l'armée, encouragent également les filles à rejoindre des carrières technologiques.

Quelques exemples de belles réussites
Maxine Fassberg a été Présidente d'Intel Israël et vice-président de la société mondiale. En 2012, elle a été reconnue par CNN comme l'une des 10 femmes les plus puissantes en technologie.
Orna Berry a été la première femme (et la seule jusqu'à présent) Chef scientifique d'Israël, dans les années 90. En 2011, elle a rejoint EMC Corporation en tant que vice-présidente du département innovation, à la tête des centres de R&D.
Michal Tsur est considéré comme l'une des femmes les plus puissantes de l'écosystème des start-ups israélien. Cofondatrice de Cyota, une société de sécurité en ligne, elle est aujourd’hui Présidente et cofondatrice de Kaltura, une plateforme vidéo open source.
Nava Swersky Sofer, experte en innovation et en commercialisation technologique, est actuellement directrice générale d'IDCBeyond, un programme du Centre de recherche interdisciplinaire d’Herzlia (IDC) pour former la nouvelle génération d'entrepreneurs, notamment en biomédecine et technologie.
Hilla Brenner est la fondatrice de Yazamiyot, un groupe entrepreneurial féminin qui a travaillé avec Google pour créer Campus for Moms.
Sari Roth (religieuse haredit) a été en 2015 la cofondatrice de Bontact, plate-forme multicanal intelligente pour la communication client-entreprise.


Noémie Grynberg / Israel Magazine 2017

 

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