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Gabriel Lippman : un physicien haut en couleurs

Scientifique français, lauréat du prix Nobel de physique en 1908, Gabriel Jonas Lippman est surtout connu pour l’invention du premier procédé permettant d’obtenir des images photographiques en couleur stables.

De père lorrain et de mère alsacienne, Gabriel Jonas Lippman naît le 16 août 1845 à Hollerich au Luxembourg. Après que la famille a rejoint la France, le jeune Lippman fait ses études à Paris, au lycée Napoléon (actuellement lycée Henri-IV) où il prend goût aux sciences, puis à l'École normale supérieure où il entre en 1868. Élève brillant mais indiscipliné, il échoue au concours d'agrégation.
Il part alors en Allemagne en 1872 pour une mission scientifique officielle à Heidelberg puis à Berlin. Il commence ses recherches sur les phénomènes physiques électrocapillaires (variation de tension sous l’action d’un champ magnétique).
Lippmann rentre en France au début de 1875 et soutient devant la Faculté des sciences de Paris sa thèse de doctorat ès sciences intitulée "relations entre les phénomènes électriques et capillaires". Sa théorie fait sensation. Cela le conduit à fabriquer un électromètre capillaire extrêmement sensible, utilisé dans les premiers électrocardiographes. Il rejoint le laboratoire de recherches physiques rattaché à l'École pratique des hautes études jusqu'à sa nomination comme maître de conférence à la Faculté des sciences de Paris en 1878.
Nommé professeur à la Sorbonne et directeur du laboratoire de physique, il étudie la polarisation des piles, la détermination de la valeur de l’ohm et la piézo-électricité (champ électrique appliqué à certaines faces de corps cristallisés produisant une déformation de ce corps) en 1881. En 1883, il est nommé professeur titulaire de la chaire de calcul des probabilités et de physique mathématique à la Faculté des sciences de Paris, puis en 1886 professeur de physique générale et directeur du laboratoire des recherches physiques. La même année, il est élu à l’Académie des sciences, académie qu'il présidera en 1912.
Il devient président d'honneur de la Société française de photographie de 1897 à 1899 et participe à la création de l'Institut d'optique théorique et appliquée (SupOptique). Il sera également nommé membre de la Royal Society de Londres.
Lippmann a travaillé dans de nombreux domaines tels l’électricité, la thermodynamique, l’optique et la photochimie. Parmi ses nombreuses autres contributions, on peut mentionner ses travaux en sismologie, en pyroélectricité (changement de température entraînant une variation de polarisation électrique), ainsi que l’invention du galvanomètre (appareils de mesure électriques), du dynamomètre (appareil de mesure d'une force) et du coelostat, instrument compensant la rotation de la Terre et permettant de photographier une région du ciel rendue apparemment fixe.
Le 12 Juillet 1921, le savant meurt en mer, au retour d’une mission au Canada.

Sa découverte majeure
En 1891, Lippman est le premier à chercher et obtenir une restitution tridimensionnelle des objets, observable sans accessoires. Inventeur d'un procédé de photographie des couleurs, il découvre ce qu'il baptise la "photographie intégrale" en disposant des microlentilles sphériques sur l'émulsion photographique.
Dans cette méthode, une couche épaisse de chlorure d’argent est déposée sur un miroir. La lumière incidente, interférant avec la lumière réfléchie, provoque des ondes stationnaires à l’intérieur de la couche photographique. Cette technique révolutionnaire basée sur le phénomène d’interférence dont les résonances se retrouvent aujourd’hui dans les technologies les plus modernes, permet de reproduire par la photographie les tonalités et les teintes des couleurs de manière directe. Sa découverte permet la reconstitution intégrale de l’ensemble des longueurs d’onde réfléchies par un objet. Toutes les couleurs sont fixées sur la plaque avec leurs teintes exactes et leur éclat. La fixation est absolue et les couleurs peuvent rester sans perdre de leur vivacité indéfiniment exposées à l’air et à la lumière.
Mais ce procédé se révèle trop complexe et ne sera pas exploité à grande échelle. Il est abandonné à cause de la difficulté du développement d’une grosse épaisseur de chlorure, des temps d’exposition trop longs et de l’impossibilité de reproduire l’image, bien qu’il soit excellent pour le rendu des couleurs. Cependant, la découverte de Lippmann reste une étape capitale dans l’histoire de la photographie même si elle s’est avérée peu pratique.
Sa découverte de reproduction photographique des couleurs lui vaut le prix Nobel en 1908.

 

Israel Magazine / Noémie Grynberg 2009

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